J'ai choisi, je me suis échappée, éloignée, affirmée. J'ai dit oui à Othello et non à mon père. J'ai quitté la terre et pris la mer. Nous voguons vers Chypre.
J'ai quitté la terre mais j'ai pris quelques graines, quelques racines à nourrir et à faire grandir. Pour partir sans me perdre.


Ici je les plante, je les dépose, et déjà quelque chose échappe et flue comme l'eau. Si je peux relayer le vivant je ne peux maîtriser ce qui sera. Cela dépend. Du temps, du terrain, de l'autre, de la place qu'il m'est accordée et qui nous est accordée. Pour aller à, jetés, sans savoir où ni d'où on y va.

Mais je peux accompagner. M'émerveiller du possible. Accueillir ce nouvel espace. Ouvrir les mains. A gestes simples, mesurés, adaptés, poser du soin, être une présence. Et une personne.
Bien loin des oui démesurés prêtés à la vierge ou à la prostituée, je peux être entière dans l'élan et l'ouverture que je soutiens. Bthulta, le coeur non divisé.

En occident la femme est un non–pensé ; elle est du latent, du sous–entendu. En orient la femme est un dos, et le –t qui marque le féminin indique aussi l'exagération et les traits positifs de l'humain.
On me dit Marie en somme, de quelque façon qu'on me nomme, difficile ici et là d'y échapper. Pourtant même le dos a un visage. Je connais mon visage et mon corps ne peut être que pour les autres.

Curieux paradoxe, que cette injonction à la maternité couplée à tout un continuum de violences et de négations polymorphes à l'égard du féminin. Par peur de ce qui échappe, croire à la cruauté pour mieux croire posséder le vivant?
Archaïque, essentiel, façonné, j'ai ce drap et ses deux faces. S'y déposent tout ensemble des oui et des non, le sang des naissances possibles et le sang des naissances venues, et l'eau du ciel et celle de la terre pour laver et recommencer.

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