Observez le silence après la pluie... la rapidité avec laquelle le ciel se ressaisit... les fleurs repoussent même après les hivers les plus rudes...

L'entrée dans le XVIème siècle vient comme un printemps. Je revis, je redeviens un lien de vie qui bruit doucement à vos pieds. Je vous vois, gabarriers, gabarrières, et autres gens de rivière, rire et prospérer. Je peux porter vos bateaux légers sans heurts ni malheurs de Souillac jusqu'au grand océan. Sur mes rives de nombreux moulins chantent en foulant les étoffes ou en moulant noix et blés. Et vous, vous bâtissez vos châteaux non plus pour guerroyer mais pour demeurer.

Dans cette quiétude la Renaissance fleurit, riche de récits. Ceux de Marguerite d'Angoulême, conteuse hors pair. Et ceux de ces deux grands amis que sont Montaigne et La Boétie. Ah, La Boétie, un pied à Sarlat et l'autre à mon estuaire, j'apprécie, vraiment, la poésie qu'il me dédie : "O entre tes beautés, que ta constance est belle C'est ce coeur assuré, ce courage constant, C'est parmi tes vertus, ce que l'on prise tant : Aussi qu'est–il plus beau, qu'une amitié fidèle? (...) Je vois bien, ma Dordogne encore humble tu vas : De te montrer Gasconne en France, tu as honte. (...) Laisse, laisse-moi faire, et un jour ma Dordogne Si je devine bien, on te connaîtra mieux : Et Garonne, et le Rhosne, et ces autres grands Dieux En auront quelque ennui, et possible vergogne."

Hélas. Hélas vous êtes humains, vos courants ne peuvent être constants, vous avez besoin de croyances pour vous raconter le monde, vous ancrer au pays. Et de nouveau le ciel s'assombrit. Les guerres de religion grondent, je redeviens un lieu de frondes meurtrières entres catholiques et protestants.
Mais est–ce que je me sépare en deux moi, est–ce que je me renie suivant comment on me regarde, comment on me croit, comment on me veut?

C'est une histoire de pouvoir. La foi du roi d'avant contre celle du roi de maintenant. Henri de Navarre, petit–fils de Marguerite d'Angoulême, protestant, tient, puis il s'arrête, il écoute Montaigne. Il se convertit.
Le conflit s'assoupit. Mais ne se délie pas, il en reste des absences pesantes dans les coeurs et les familles : les enfants placés dans des institutions, les proches exilés dans les Pays du Refuge.

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